Littérature étrangère

David Nicholls

Summer Mélodie

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photo libraire

Chronique de Florence Reyre

Librairie Du côté de chez Gibert (Paris)

C'est frais, vrai et si bien campé qu'on entre dans cette histoire d'amour adolescente à pieds joints. Les années 1990, la campagne anglaise, les personnages si British et bien sûr Shakespeare.

Eté 1997, fin de lycée. Charlie, 16 ans, n'a aucun plan, aucun désir, aucune perspective. L'exergue de la première partie est un extrait de Carson McCullers qui définit parfaitement ce que c'est d'être Charlie : « Elle ne se sentait aucune attache, et elle rôdait autour des portes, et elle avait peur ». Il se laisse couler en compagnie de son père dépressif, disquaire en faillite, et de sa pseudo bande de copains bruyants et parfaitement crétins. Mais à 16 ans, la vie est là, les amitiés et les amours vous remettent en route vers l'inconnu. Charlie croise Fran Fisher, si belle, si pétillante, l'occasion de faire un pas de côté dans ce quotidien morne et changer de monde. Une troupe de théâtre amateur monte Roméo et Juliette. Charlie, pour les beaux yeux de Fran, se retrouve acteur et amoureux. Bien plus amoureux qu'acteur mais qu'importe, un futur s'ouvre à lui. C'est un vrai roman d'apprentissage, les adultes sont pleins de failles, la classe moyenne est terriblement moyenne, le monde sans avenir. Charlie pousse ses défauts d'adolescent à l'extrême, c'est une vraie tête à claques qu'on a souvent envie de secouer et de remettre dans le droit chemin, ce qui lui arrive d'ailleurs régulièrement. Charlie va lentement sortir de l'impasse où son origine sociale l'avait confiné. Le processus durera des années, pas de baguettes magiques ni de happy end ici. Par le rythme du roman fait d'épisodes courts longuement narrés et d'ellipses longues, on le voit évoluer pendant des années et ça le rend d'autant plus attachant. Les romans anglais ont souvent une analyse de leur époque sensible et réaliste : c'est la réussite de celui-ci de nous faire percevoir les craintes d'un garçon dont la famille ne connaît que la faillite économique et affective, reflet de la crise nationale, et qui devient un adulte qui a trouvé sa voie et sa vie.