Littérature étrangère
Louise Erdrich
Comme des pas dans la neige
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Louise Erdrich
Comme des pas dans la neige
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Michel Lederer
Albin Michel
30/10/2024
480 pages, 23,90 €
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Chronique de
Marianne Stelmach
Librairie Au détour des mots (Tournon-sur-Rhône) - ❤ Lu et conseillé par 18 libraire(s)
✒ Marianne Stelmach
(Librairie Au détour des mots, Tournon-sur-Rhône)
Prix Femina 2023 pour Sentence, Louise Erdrich, l'une des voix les plus marquantes de la littérature amérindienne, nous revient avec ce roman célébrant l'être humain, aussi imparfait soit-il.
Si ses dernières histoires se déroulaient dans une Amérique plutôt contemporaine, Comme des pas dans la neige nous emporte un peu plus loin dans le temps, au début du XXe siècle. En 1912, dans le Dakota du Nord, la neige tombe indéfiniment cet hiver : hiver terrible pendant lequel les amérindiens Ojibwé meurent terrassés par la maladie et la famine aggravée par l'accaparement de leurs biens. Nanapush, figure de l'ancêtre, celui qui a vu dans sa vie « davantage de changements qu'au cours de centaines et de centaines d'années », ouvre le récit en racontant à sa petite-fille l'histoire de sa mère à elle, Fleur Pillager, véritable héroïne du roman. Celle qui restera habiter dans sa cabane, dans la forêt, celle de ses ancêtres, pour ne pas qu'on la lui prenne. Celle à qui on prête des pouvoirs surnaturels et celle qui voudra venger les siens de celui qui les a poussés à la misère et les a privés de leurs terres. Plusieurs voix vont se mêler à la voix de Nanapush, chacune donnant à voir Fleur oscillant sans cesse entre la colère, la vengeance et le désir d'apaisement, d'amour et de pardon. S'inscrivant dans la lignée de Dernier rapport sur les miracles à Little No Horse ou de Love Medicine, ce roman est en fait la réunion de deux textes écrits à vingt ans d'intervalle : Traces et Quatre âmes, ce dernier n'ayant jamais été publié en français jusqu'alors. Les lecteurs assidus de cette autrice auront le plaisir de découvrir ça et là des noms qui leur seront familiers. Nous retrouvons ici la veine plus onirique d'Erdrich, où la question de l'acculturation, de la perte de sens est des plus présentes et des plus douloureuses. Il émane de ce livre, par son histoire et par le style lumineux de son écriture, un puissant sentiment de liberté et d'indépendance.