Polar

Dennis Lehane

Ce monde disparu

  • Dennis Lehane
    Traduit de l’anglais (États-Unis) par Isabelle Maillet
    Rivages
    28/10/2015
    352 p., 21 €
  • Chronique de Solveig Touzé
    Librairie La nuit des temps (Rennes)
  • Lu & conseillé par
    11 libraire(s)
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Chronique de Solveig Touzé

Librairie La nuit des temps (Rennes)

Dans Ce monde disparu, Dennis Lehane s’intéresse à la fin de l’âge d’or des mafias, ce moment de basculement où la toute-puissance de quelques privilégiés fut remise en question par l’avidité de leurs subalternes.

Tampa, 1943. La guerre qui fait rage en Europe occupe les esprits, dépouille la ville de ses hommes, mais n’empêche pas la Mafia de dormir sur ses deux oreilles. Qu’il s’agisse de drogue, d’alcool, de femmes ou de transports, Joe Coughlin et sa bande ont expérimenté tous les domaines et ont régné en maîtres sur quelques-uns. Bien que Joe se soit éloigné du cœur des affaires et ait décidé de passer le relais à Dion Bartolo, son second, il reste une figure légendaire, prenant son rôle de conseiller à cœur. Alors, le jour où il apprend qu’un contrat a été lancé sur lui, il panique, cherche à comprendre, n’y croit pas vraiment, mais tout de même, se demande qui aurait bien pu avoir l’idée de s’en prendre à lui. Lui, Joe Coughlin, l’homme qui a tenu Tampa dans sa main pendant tant d’années. Dennis Lehane, qui clôt ici le triptyque débuté avec Un pays à l’aube et Ils vivent la nuit (Rivages noir), sait comment happer son lecteur, dès les premières pages, en lui promettant du sang, de la violence, de l’immoralité. Mais la violence n’est pas gratuite, elle vient comme une vengeance, une menace, une manière de faire comprendre les choses, de ne pas avoir à les répéter. On ne tue pas pour rien dans la Mafia, on obéit à des règles strictes, à des lois tacites. Ce sont tous ces non-dits que l’auteur dépeint avec talent, ainsi que les doutes qui assaillent ces hommes tout-puissants, leurs failles, leurs souvenirs, leurs amours. Ce monde disparu est un roman sur les hommes, sur la violence, mais aussi sur les regrets, sur ce que l’on garde avec soi tout au long de notre vie. Pour ceux qui auraient peur de voir Lehane sombrer dans le sentimentalisme, rassurez-vous ; c’est sombre, c’est dur, c’est violent, et c’est excellent.