Jeunesse

Emmanuel Bourdier

À la rencontre de John Lennon

Entretien par Laëtitia Toinen

(Librairie Mots et Images, Guingamp)

Avant d’être reconnu internationalement, John Lennon a bien sûr été enfant ! Emmanuel Bourdier le raconte aux jeunes (et aux moins jeunes !) avec cette « photographie littéraire » prise lors de sa onzième année. Nul besoin d’être bon lecteur ou mélomane pour dévorer cette biographie romancée.

Est-ce la vie de John Lennon enfant qui vous a inspiré ce beau roman ou votre cœur d'enfant qui a eu envie de vivre une aventure littéraire avec lui ?

Emmanuel Bourdier - Mon cœur d’enfant guide l’écriture de chacun de mes ouvrages depuis le départ et c’est un guide de confiance, mais c’est surtout ma passion de toujours pour les Beatles qui a trouvé ici son aboutissement. Je tournais autour depuis longtemps, mais jamais avant John, mes deux passions, la musique et l’écriture, n’avaient fusionné à ce point. Et je crois que le déclic est venu des regards adolescents, à la fois fraternels et douloureux, échangés par Lennon et McCartney dans le film Get back de Peter Jackson. Là, au sommet de leur gloire, les Beatles redevenaient ces deux gosses de Liverpool, blessés, complices et vivants.

 

Pourquoi avoir choisi de ne pas faire une biographie linéaire et classique, mais plutôt de nous embarquer avec John dans sa onzième année ?

E. B. – Jacques Brel disait qu’à 16 ans, un homme a eu tous ses rêves et qu’il passe ensuite sa vie à les réaliser. Je ne sais pas si c’est une règle absolue, mais je pense que l’enfance de John Lennon, avec ses émerveillements et ses cicatrices, ses rêves et ses cauchemars, a été fondatrice. Elle a fait de lui cet homme complexe, drôle et torturé, génial et violent, aimant et abandonné. Les jeunes lecteurs pourront peut-être se reconnaître dans cet âge des possibles parfois semés d’embûches. Les amoureux de musique y apprendront peut-être des choses sur le passé de John. Et les vrais puristes des Beatles s’amuseront à dénicher les clins d’œil, les citations, les vérités et les petits arrangements fictionnels.

 

Quelle est la part de fiction et de réalité dans cette histoire ? Comment et jusqu'où vous êtes-vous documenté sur le sujet ?

E. B. – La plupart des faits, en particulier les plus marquants, sont rigoureusement exacts. Certaines phrases ont vraiment été prononcées. Et puis il y a les inventions, la littérature, ma part de « je » dans ce jeu-là. Pour préparer le roman, il y a eu deux phases de recherches. La première a duré une quinzaine de jours et m’a dévoré jour et nuit. Je suis même allé jusqu’à vérifier la vraie couleur des fauteuils de la tante Mimi et la nature exacte du cadre au mur de la maison d’enfance de John. Et puis il y a la phase, plus inconsciente, qui dure depuis mon adolescence et qui découle de tout ce que j’ai lu ou vu sur les Beatles. Je me suis ensuite amusé à entremêler le vrai et le plausible, la réalité et l’invention pure. L’écriture, très rapide, d’un jet, s’est faite dans un perpétuel mouvement de balancier qui m’emmenait de l’euphorie au sentiment d’imposture. Grisant, émouvant et parfois troublant.

 

Avez-vous pour habitude de travailler et chercher l'inspiration en musique ? Et particulièrement pour ce roman ?

E. B. – Il peut se passer des mois sans que je n’écrive une ligne, mais une journée sans musique est inenvisageable. Alors oui, j’écris en musique et, bien sûr, particulièrement pour ce roman-là.

 

À la fin du livre, vous proposez la « bande originale de John » ainsi qu’un QR code pour écouter les titres évoqués tout au long de la lecture. Comment avez-vous fait votre choix ? Pourquoi ces titres ?

E. B. – Je programme et anime une émission de radio musicale depuis trente ans. Avant cela, je concoctais des compilations sur cassette puis sur CD à tout ce qui bougeait. Ce partage de la musique que j’aime fait vraiment partie de mon ADN. Alors, lorsque Flammarion Jeunesse a accepté mon idée du QR code pour accéder à tous les morceaux cités, écoutés par John dans son enfance, ceux évoqués ou même cachés entre mes lignes, j’ai sauté au plafond. J’ai dû reprendre cette playlist quatre fois et je remercie au passage Aélys, la super éditrice qui a fait preuve d’une héroïque patience. Mon roman est, je pense, cinématographique. J’en ai donc rêvé la bande originale.

 

Vous offrez régulièrement aux jeunes lecteurs de nombreux romans aux thématiques différentes. Avez-vous une tranche d'âge préférée en écriture ? Imaginez-vous essayer l'exercice pour les adultes ?

E. B. – Mais je crois sincèrement que tous mes livres sont pour les adultes, pour « eux aussi » en tout cas. Mes histoires ont toutes un âge de départ, mais pas d’âge d’arrivée. Les artistes que j’admire, de Chaplin à Goscinny, s’adressent à tous, touchent tous les âges. Alors si vous avez aimé ce John, si ces petits Calédoniens de 9 ans ont suscité l’envie de créer des danses tribales sur mon Vachement moi ! (Nathan), si cette professeure de français a pleuré à chaudes larmes alors que je lisais Les Jours noisette (Utopique) à ses collégiens, si cette libraire de Saint-Étienne a ri de bon cœur au milieu de la nuit en lisant Bande à part (Flammarion Jeunesse) et si ma grand-mère a été heureuse en lisant Entre les lignes (Thierry Magnier), alors je suis un auteur comblé.

 

À propos du livre

Toutes les stars ont été des enfants et cette enfance les a forgées. Voilà ce que nous rappelle Emmanuel Bourdier dans cette pépite littéraire. Il plonge le lecteur à Liverpool en 1950, aux côtés de John Lennon, lors de sa onzième année. Éduqué par sa tante et son oncle, il ne verra sa si fantasque maman qu’épisodiquement, son père étant lui complètement absent. John ne correspond pas aux attentes de la société. Il rêve d’être un artiste ! Dessinateur, poète, musicien… La vie n’est pas simple pour les âmes idéalistes. Alors entre bêtises et coups de poing, John tentera à sa manière de se faire aimer et de se trouver lui-même. Un beau roman pour les jeunes et tous les autres !

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