Littérature étrangère

Herman Koch

Villa avec piscine

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photo libraire

Chronique de Anne Dagorn-Lévy

Librairie Pages après pages (Paris)

Bienvenue chez Herman Koch ! Bienvenue au sein d’un univers aux trompeuses apparences ! Car les vacances estivales de trois couples et quatre adolescents réunis le temps d’un été dans une villa avec piscine, va s’avérer nettement moins idyllique qu’il n’y paraît.

Le récit est fort, féroce. Certaines scènes sont très crues. Dans Le Dîner (Belfond, 2011), son précédent roman, Herman Koch propulsait son lecteur dans un monde proche de Festen, un monde où pitié et compassion sont des notions inconnues. Villa avec piscine se présente comme une succession de portraits de personnages bicéphales, tour à tour admirables et malsains, enclins à faire le bien puis profondément immoraux l’instant d’après. Certains iront même jusqu’à s’abandonner aux pires extrémités… Le personnage principal est un médecin généraliste qui essaye d’exercer son métier de la manière qu’il juge la plus honnête possible. Pourtant, quelques-unes de ses pratiques s’avèrent franchement limites. Quant à Ralph Meier, l’acteur bellâtre, il est décrit comme un rapace guettant ses proies féminines. Les femmes du roman, alternativement vertueuses et volages, ne sont pas mieux loties. Les adolescents non plus, que l’on voit mentir effrontément, se livrer aux troubles jeux de la séduction et de la perversité, se conduire avec lâcheté et mesquinerie… L’auteur dépeint des hommes et des femmes particulièrement peu reluisants, qui tous sont en permanence sur le point de sacrifier la morale à leur égoïsme, à leurs tristes intérêts, à leurs désirs immédiats. Le récit est sulfureux et irritant, il déroute et pose à chaque page, chaque ligne, presque chaque phrase, la question du bien et du mal. Le lecteur est tenté de prendre parti pour l’un ou l’autre des protagonistes, puis il se ravise, constatant que, finalement, celui-là agit de façon aussi révoltante que les autres. Herman Koch passe en revue les instincts les plus brutaux de l’humanité, et pourtant, au détour des pages, surgissent avec une improbable grâce l’amour et la tendresse. Car rien n’est complètement noir ni complètement blanc. Entre les deux, des nuances qu’Herman Koch décline avec une subtilité mordante.