Littérature

Page des libraires 231- Printemps 2025

  • Page des libraires 231- Printemps 2025

    10/04/2025
    168 pages, 17 €
  • Chronique de Mehdi Ain-Bouzid
    Librairie L'Alternative (Neuilly-Plaisance)
MA

✒ Mehdi Ain-Bouzid

(Librairie L'Alternative, Neuilly-Plaisance)

110, c'est le nombre de libraires qui viennent faire des infidélités à leurs étagères et leurs cartons de livres pour gratter quelques lignes dans ce numéro...

110 plumes pour ce drôle d'oiseau qui a trouvé son chemin entre vos mains pour vous annoncer le printemps. 110 libraires-rédacteurs donc, qui ont dû faire un pas de l'autre côté du miroir et s'interroger de la même manière qu'ont dû le faire à un moment les auteurs qu'ils viennent sublimer dans les pages à venir : pourquoi écrire ? Alors attention, gardons les chevilles dégonflées et le melon au marché avant de sombrer dans un gouffre d'arrogance : il y a un abîme de travail entre celui d'un auteur et nos modestes paragraphes critiques. Et pourtant, fondamentalement, un même cap à passer. Un moment ou un chemin, un petit pic d'orgueil sain qui nous souffle qu'on a peut-être un truc à dire qui vaut la peine d'être lu. Du côté des auteurs, j'ai toujours eu un infini respect pour le niveau d'engagement et d'assiduité qu'un tel processus implique, là où il me faudra faire les cents pas et éviter mille distractions pour vous pondre cet édito. Mais restons modestement avec mes 109 respectables collègues à nous demander ce qui nous a poussés à nous écarter de nos boutiques, le temps de jouer les critiques littéraires. J'aime à croire que le mouvement d'écriture existe avant la plume, avant l'idée même d'un texte. Que nous écrivons tous constamment. C'est cette réflexion en tâche de fond, ce moulin qui tourne à l'arrière de l'esprit, à moudre notre dernière lecture marquante, pendant qu'on déballe un carton ou range une étagère dans un geste mécanique. C'est ce flottement qui vous accompagne lorsque que vous sortez d'une salle de cinéma, cette part de votre âme qui est restée dans la salle obscure à se demander pourquoi c'était bien alors que vos jambes sont déjà sur le chemin du retour. Ces pensées qui vous hantent délicieusement sous la douche et méditent sur la qualité du roman graphique que vous venez de terminer. Parfois, on s'arrête là et c'est très bien. Parfois, ça démange, ça gratte sous la boîte crânienne et il faut le dire à tout le monde. Alors germent ces petites notes manuscrites dans nos boutiques et ces mots sur la page. Ce sursaut d'ego libraire, cette satisfaction de guider vos regards vers ce qu'on a jugé digne de votre curiosité. 110 plumes donc. Mais en vrai j'ai pas compté !

 

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