Littérature française

Jean Rouaud

Un peu la guerre

photo libraire

Chronique de Wilfrid Sejeau

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Le lecteur est averti dès la première page : le genre de la biographie littéraire n’est pas le genre de Jean Rouaud. Et d’ailleurs quel est le genre de ce livre ? Quand Rouaud fait son entrée à l’université peu après Mai 68, l’époque est à la fin du roman « bourgeois », disqualifié par les avant-gardes littéraires qui lui préfèrent le nouveau roman et ses innovations formalistes. Pas de veine pour l’apprenti prosateur. Quoi écrire quand le vent de la modernité l’invite à taire ses origines chouannes, sa généalogie de petits commerçants et d’artisans, son éducation dans une école religieuse ? Pourtant, l’auteur des Champs d’Honneur (Minuit) raconte, au gré d’une écriture splendide qui entraîne dans de délicieuses digressions, sa naissance au monde de la littérature, la création de son sujet, de son genre, une forme de roman, mais pas seulement. Et pour cela, on passe par les aventures de Cortés, ou de belles pages sur l’histoire familiale, ou encore l’exploration du monde et l’apparition de nouvelles taches blanches sur le temps disparu, la rencontre avec l’éditeur de Beckett, la modernité et la guerre, bien sûr, un peu.

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