Féru d’Histoire, vous avez écrit de nombreux livres sur les Indiens d’Amérique du Nord, sur la Préhistoire. Pouvez-vous nous confier comment est né ce roman ?
J'ai toujours pensé que pour que des enfants comprennent notre civilisation, ils devaient étudier d'autres façons de vivre en d'autres lieux et en d'autres époques. De la même manière qu'on ne peut percevoir une couleur si on ne l'oppose pas à une autre couleur. Aussi, en situant des récits dans le monde amérindien ou le monde préhistorique, j'ai la volonté de leur faire appréhender qu'il y a d'autres façons de penser le monde, les dieux ou le sens de la vie. Pour ce qui est de la guerre de 1914, cela rejoint mon histoire familiale. Comme mes parents travaillaient, j'ai été en grande partie élevé par mon arrière-grand-mère qui vivait avec nous car elle était veuve de guerre. Le portrait de son mari Léonce, mort en 1915, trônait dans sa chambre, avec ses décorations. Cela m'a d'autant plus marqué qu'elle n'en parlait jamais. Je me suis donc passionné pour la Grande Guerre et j'ai collectionné des cartes postales, des objets et même des journaux de poilus. J'ai donc nourri cette passion et, en bon enseignant que je reste, j'ai envie de la partager.
La lecture du journal de guerre de Léonce plonge Ludo, le protagoniste, au cœur de l’Histoire. Il comprend l’amitié, la solidarité mais éprouve aussi les affres de la guerre, ses absurdités, la peine, la mort aussi. Est-ce cela, pour vous, écrire : transmettre, donner à penser grâce aux histoires inspirées de l’Histoire ?
Quand la Grande Histoire traverse des drames, les destins individuels sont soudain pris dans une véritable tourmente. Je crois qu'on n'y survit moralement qu'en se serrant les coudes. Seuls l'amour, l'amitié, la solidarité peuvent nous sauver. C'est le cas de nos trois copains soldats que l'origine méridionale rassemble. C'est cela qui fascine Ludo lorsqu'il lit le journal du poilu qu'il a trouvé. Je voudrais, bien sûr, qu'il en soit de même pour tous les enfants qui me liront. Face à la mort brutale d'un des trois copains, je souhaite qu'ils en ressentent la douleur et l'injustice.
Ludo et ses parents partent à la recherche d’un trésor celte, trouvé et caché par ces trois poilus. S’agit-il d’un fait réel ou d’une astucieuse invention de l’écrivain afin d’amener un peu de légèreté et d’aventure au texte ?
Un jour où je feuilletais un numéro du journal L'Illustration de 1915, j'ai lu qu'en Picardie, des soldats avaient trouvé la tombe richement ornée d'une princesse celte. En faisant des recherches, je me suis rendu compte que beaucoup de pièces majeures de nos musées ont été découvertes lors des creusements de tranchées et des bombardements. Cela m'a fasciné et j'y ai vu là la possibilité de mêler au tragique le souffle de l'aventure.
À propos du livre
Michel Piquemal raconte une formidable histoire d’amitié entre trois poilus, née dans l’horreur des tranchées, scellée par la découverte d’un trésor et immortalisée dans un journal retrouvé cent ans plus tard par Ludo. Tout comme lui, le lecteur est plongé dans le quotidien de ces soldats fait de violence, de peur et d’incertitude, que seuls la solidarité, l’amitié et l’espoir peuvent apaiser. L’auteur donne vie à des personnages que l’on garde longtemps en soi. C’est un roman très juste, extrêmement touchant, donnant aux plus jeunes des clés pour comprendre l’Histoire et la nature humaine, comme sait si bien le faire Michel Piquemal.