Quel que soit notre rapport à la gastronomie, tout un chacun a déjà entendu les noms de Pierre Hermé et Alain Ducasse. Ils ont révolutionné, chacun dans leur domaine ‒ Alain Ducasse pour la cuisine, Pierre Hermé pour la pâtisserie ‒ la vision, les pratiques et la communication de cet univers professionnel. Ces deux stars ont également été les pionniers de la tendance encore actuelle des publications pléthoriques de livres de recettes de cuisine. Dès les années 1990, ils ont publié leurs premiers recueils de recettes et ont régulièrement fait l’actualité de l’édition culinaire. Ils racontent ici de façon intime leur histoire, à la fois personnelle et professionnelle, ainsi que leur philosophie de vie et de travail. Le lecteur sera frappé par la similitude de leurs trajectoires malgré des différences bien évidemment notables. Ils sont forcément très attachés à leurs racines, le Sud-Ouest pour Ducasse, l’Alsace pour Hermé. Mais ils se sont tous deux ouverts au monde, au Japon avec lequel ils nouent une relation particulière, à la Méditerranée, plus particulièrement pour Ducasse. Dans ce milieu professionnel de l’entre-soi, on reste malgré tout étonné des parcours entremêlés de ces deux personnages. Ils se sont rencontrés jeunes, chez Lenôtre. Alain était commis, Pierre apprenti. Ils se sont croisés pendant plus de vingt ans, la meilleure amie de l’un, Frédérick E. Grasser, étant l’épouse de l’autre. Et ces deux esthètes ont en commun une vision de leur métier atypique et novatrice, faite d’expérimentations avec une grande foi en leurs capacités et leur goût. Ils se rejoignent également sur leur qualité d’entrepreneur. Ils partagent le désir de la transmission, d’un savoir-faire et d’une éthique professionnelle. Artisans, artistes, difficile de les définir d’un seul terme tant leur curiosité les amène à repousser chaque jour les limites de leur métier. Mais une fois n’est pas coutume, cette chronique met également en scène votre humble serviteur. En effet, j’ai eu la grande chance de croiser la route de Pierre Hermé (je ne désespère pas de croiser également celle d’Alain Ducasse un jour) lorsque la librairie Sauramps l’avait invité pour la sortie de ses Confidences sucrées en 2007. J’étais à l’époque déjà très admiratif du travail de ce grand maître du sucré et, conséquemment, impressionné par le personnage. J’ai découvert un homme à la fois réservé et passionné par la transmission de son travail auprès du grand public, très sûr dans ses convictions et discret dans son rapport aux autres. Ce fut une rencontre éminemment marquante de ma longue vie de libraire.