Polar

Zone d'ombres

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Par Linda Pommereul

Librairie Doucet (Le Mans)

Max Monnehay publie aux éditions du Seuil deux romans policiers qui mettent en scène Victor Caranne, un psy en milieu carcéral. En seulement deux polars, l’auteure de Corpus Christine s’est fait une place de choix dans le milieu du roman noir. Deux enquêtes écrites à l’encre rouge qui confirment, s’il en était besoin, le talent de cette jeune écrivaine.

Max Monnehay est l’auteure de plusieurs romans dont Corpus Christine (Albin Michel), prix du premier roman 2006. En 2020 est publié Somb qui ouvrait les aventures de Victor Caranne. Avec Je suis le feu, elle récidive, l’occasion de retrouver notre psy dans une nouvelle aventure. Chaque matin, Victor quitte le continent pour l’île de Ré et sa magnifique citadelle reconvertie en prison de haute sécurité. Il écoute les confessions, les cauchemars, les fantasmes et les atrocités commises par les détenus. Caranne, comme bon nombre de psys, est imprégné par ses propres névroses. Un traumatisme lié à son passé le ronge peu à peu. Dans Somb, il va devoir enquêter sur la mort de sa maîtresse qui n’est autre que la femme de son meilleur ami, Jonas. Avec cette intrigue sous tension, Max Monnehay interroge la notion de culpabilité et de remords. Elle remet en question la sincérité du lien amical. Rattrapé par son passé, il évolue en eaux troubles au gré des souvenirs et d’un passé douloureux qu’il soigne à coup de gueule de bois. Pour l’aider, il est soutenu par Marcus, un jeune délinquant qu’il a pris sous son aile après sa libération. On retrouve ce duo dans Je suis le feu. À La Rochelle, au mois de juillet, une femme est retrouvée morte, égorgée. C’est la deuxième en l’espace de trois mois. Le commissaire Baccaro fait appel à Victor pour profiler le tueur. Une nouvelle enquête commence sur la piste d’un tueur froid et cruel qui exécute des mères célibataires. Au-delà d’une maîtrise évidente des règles de l’intrigue et de ses rebondissements, Max Monnehay sait à merveille dessiner des personnages complexes, disséquer les secrets et la monstruosité enfouis en chacun de nous. Outre sa sincérité dans la construction des personnages, son exploration d’univers sociaux ou professionnels, notamment le milieu carcéral, est sa marque de fabrique. On avait déjà conscience, en lisant Somb, de la force de la dimension psychologique de ses récits. C’est ce talent qu’elle conforte avec Je suis le feu en allant encore plus loin dans la description des méandres de l’âme humaine confrontée aux pires conditions de survie. Le tueur est une authentique figure du mal. Pourtant sa cruauté cache une souffrance qui mettra Victor sur la voie pour résoudre l’enquête. Une plongée au cœur de l’horreur, de la lâcheté, de la tromperie et, par contraste, de l’espoir et de la rédemption. Deux romans policiers qui confirment que Max Monnehay est une plume sur laquelle il faut compter. Et on en redemande !