Beaux livres

Christel Pigeon , Gérard Lhéritier

L’Or des manuscrits

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photo libraire

Chronique de Raphaël Rouillé

Bibliothèque/Médiathèque de Saint-Christol-lez-Alès (Saint-Christol-lez-Alès)

Oubliés, volés, détournés, sauvés de catastrophes ou endormis pendant des siècles, de nombreux manuscrits ont aujourd’hui trouvé une place, un abri, au sein d’une bibliothèque. Conservés, protégés du temps qui passe et maintenant numérisés, ils nous rappellent que l’écriture est au fondement de notre civilisation.

Dans leur ouvrage intitulé L’Or des manuscrits, Christel Pigeon et Gérard Lhéritier relatent le parcours de cent manuscrits qui ont traversé l’histoire, qui l’ont marquée et qui nous enchantent aujourd’hui encore. Du Papyrus Prisse, un recueil de sagesse considéré comme le plus vieux manuscrit du monde (Égypte, 1800 av. J.-C.), aux paroles de Yesterday (Londres, juin 1965), la chanson rêvée par Paul McCartney, l’ouvrage raconte les découvertes souvent mouvementées de ces manuscrits rares. Les Manuscrits de la mer Morte, Les Secrets des trois codex mayas, Une lettre de Jeanne d’Arc, Le Roman de la Rose, L’Édit de Nantes ou La Lettre du suicide de Charles Baudelaire ne sont que quelques exemples des manuscrits évoqués dans ce superbe ouvrage. Conservés dans des musées ou des bibliothèques comme la Bibliothèque nationale de France (Paris), la Bibliothèque du Vatican (Rome), la Pierpont Morgan Library (New York) ou la British Library (Londres), ils nous amènent à réfléchir sur l’évolution et le rôle des bibliothèques à travers le monde. C’est justement la question que se pose James W. P. Campbell dans Bibliothèques. Une histoire mondiale. Assisté du photographe Will Pryce, il interroge le rapport de l’homme à l’écrit et le changement progressif du rôle des bibliothèques dont l’architecture s’est constamment adaptée aux nouvelles pratiques. Après avoir visité quatre-vingt-deux bibliothèques dans vingt-et-un pays, les deux hommes étudient notamment l’impact de la forme des livres sur les bibliothèques et sur la manière de les conserver. De la Mésopotamie ancienne jusqu’au Japon contemporain, c’est toute l’histoire des « maisons du livre » et de leurs transformations qui jaillit comme autant de représentations de l’imagination humaine. Car si le livre est au cœur de l’ouvrage, l’architecture ne l’est pas moins. La bibliothèque, véritable refuge pour l’écrit, reste un « miroir des civilisations », et les architectes se sont tour à tour surpassés pour créer des édifices à la hauteur de la culture, de l’époque et des préoccupations du moment. Modes de construction, volume et forme, mais aussi agencements intérieurs, apparition du système mural, différentes méthodes de rangement et de conservation, sans oublier l’avenir des bibliothèques, le livre de James Campbell n’occulte rien et propose au contraire une réflexion transversale et globale sur la bibliothèque comme lieu unique qui incarne « la quintessence des réalisations humaines ». Son chapitre intitulé « Électricité, béton et acier » évoque par exemple la bibliothèque comme « paysage » et parfois comme pur exercice de « planification de l’espace », où l’ergonomie devient un critère de construction et de bien-être. Illustré de superbes photographies, l’ouvrage nous fait vivre un tour du monde des espaces qui abritent les différentes collections de livres et nous renseigne sur leur histoire, leur raison d’être. Il nous rappelle aussi, en filigrane, que la bibliothèque renvoie à l’enfance, à l’imagination et à tout ce qui nous permet de « penser, rêver et apprendre » en toute liberté. 

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