Polar

Maggie O'Farrell

Assez de bleu dans le ciel

illustration

Chronique de Isabelle Theillet

()

Futurs lecteurs, soyez tout de suite prévenus : le nouveau roman-puzzle de Maggie O’Farrell est d’une efficacité redoutable et nous emmène aux quatre coins du monde à travers diverses époques, pour notre plus grand plaisir !

Le premier chapitre s’ouvre avec Daniel qui enseigne la linguistique à l’université de Belfast. Nous sommes en 2010, au fin fond du Donegal, dans une propriété privée isolée de tout, où l’on découvre très vite qu’il y a douze portails à ouvrir et à fermer pour sortir de là en voiture ! Daniel a à peine le temps d’apercevoir un intrus dans leur jardin que sa femme est en train de tirer en l’air avec un revolver pour le faire fuir. Daniel (qui ignorait que sa femme possédait une arme !) nous précise que Claudette est folle – pas au point d’être enfermée, mais dans un « sens plus acceptable socialement » – et vit recluse. L’incident clos, toute la famille (Daniel a deux enfants : Marithe, six ans, et un bébé, Calvin) monte en voiture car Daniel doit partir aux États-Unis pour enterrer son père qu’il n’a pas vu depuis cinq ans. Le roman démarre sur les chapeaux de roue et ne va pas vous lâcher pendant 475 pages. Dans le chapitre suivant, vous rencontrez Claudette Wells à Londres en 1989, alors qu’elle croise sur son chemin Timou Lindstrom, grand réalisateur suédois de cinéma, qui l’enrôle comme actrice. Je ne vais pas vous en raconter davantage : il s’agit seulement d’histoires de familles et de couples, d’unions et de désunions qui pourraient vous paraître assez banales de prime abord. C’est là que se situe le génie de Maggie O’Farrell qui nous promène d’un chapitre à l’autre dans l’espace (de l’Irlande à la Bolivie en passant par Londres et New York) et dans le temps (depuis 1944 jusqu’en 2016). Vous savez toujours avec qui vous êtes, où et quand, et chaque chapitre se tient comme une nouvelle, avec son titre et sa chute. Et tout s’imbrique à merveille jusqu’au dénouement, avec ses scènes mémorables et ses moments d’émotion forte. Chapeau Madame O’Farrell !

Les autres chroniques du libraire